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Une dernière chance
Une dernière chance

La Presse

time2 days ago

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Une dernière chance

C'était durant la pandémie, il y a environ un siècle… Même quand il reculait ou changeait d'idée, François Legault était salué. C'était, concluait-on, une preuve d'écoute et d'humilité. En mai 2020, 81 % des Québécois avaient une opinion favorable du chef caquiste. Les mois suivants avaient été difficiles. Mais au début de son deuxième mandat, en décembre 2022, le taux de satisfaction à son égard avoisinait les 60 %. Cela en faisait le premier ministre le plus populaire au pays. Mais le temps, cet agent corrosif, a fait son œuvre habituelle. Le gouvernement Legault est rendu présumé coupable de tout ce qui va mal, à en juger par les sondages qui se suivent et se ressemblent. Quand il change d'idée, on ne salue pas son pragmatisme. On critique son incohérence. M. Legault n'a qu'une année pour renverser cette tendance lourde. Après de longues rencontres de son conseil des ministres et de son caucus, cette semaine, M. Legault prépare un vaste remaniement. Comment regagner la confiance ? Dans son entourage, on met en garde contre les réactions nerveuses ou la quête du remède miracle. Le troisième lien a montré ce risque. Dans cette saga, les caquistes ont humecté leur index puis l'ont tendu vers le ciel. Ils voulaient se laisser porter par le vent, mais ils ont eu l'air d'une girouette. M. Legault s'est lui-même mis de la pression en annonçant à l'avance un remaniement majeur. Il n'a plus le choix de déplacer au moins quelques poids lourds. Un remaniement sert habituellement à lancer de nouveaux chantiers. Dans ce cas-ci, l'objectif sera davantage de recentrer l'action autour d'un nombre limité de priorités. Car de toute façon, le temps manquera. Mais tout n'est pas que stratégie partisane. M. Legault pense aussi à son héritage. En économie, il veut accélérer le développement d'Hydro-Québec. Il aimerait conclure l'entente avec Terre-Neuve-et-Labrador sur Churchill Falls, idéalement avec une aide financière du fédéral. La nomination de Michael Sabia, ex-PDG d'Hydro-Québec, comme greffier du Conseil privé à Ottawa, ne nuira pas. L'aspect économique de la transition énergétique est sa nouvelle passion. Son approche est interventionniste. Il a injecté de grosses sommes dans un nombre limité de sociétés. Le risque n'a pas toujours été payant, comme le prouvent Northvolt et Lion Électrique. La plus récente aventure : le rachat par Investissement Québec de parts de 500 millions dans Innergex Énergie Renouvelable. Étonnamment, cette annonce n'a presque pas été vendue à la population. Les petites et moyennes entreprises se sentent laissées de côté. Elles souffrent en même temps des droits douaniers de Washington ainsi que du resserrement de l'immigration temporaire imposé par Québec et par Ottawa. Le contexte budgétaire ne permettra probablement pas des allégements fiscaux. Mais un allégement de la paperasse diminuerait leur grogne. Les minéraux critiques sont un dossier délicat. La demande bondit, pour la transition énergétique et maintenant pour l'industrie militaire. Mais personne ne veut voir de mine pousser dans sa cour, et cela se comprend. La hausse massive des dépenses militaires du fédéral profitera à une multitude d'entreprises. M. Legault se réjouira des contrats. Mais dans les milieux économiques, on s'étonne de voir que Québec insiste encore sur les créations d'emploi, alors que la main-d'œuvre manque. PHOTO CHARLES WILLIAM PELLETIER, ARCHIVES COLLABORATION SPÉCIALE L'hôpital Maisonneuve-Rosemont, dans l'est de Montréal, où les travaux d'agrandissement et de modernisation se font attendre Autre défi : les infrastructures. Les investissements atteignent des records, et pourtant, les sommes manquent pour compléter des projets essentiels comme des agrandissements d'hôpitaux ou des réfections d'écoles. Un dilemme qui se reproduit aussi dans les dépenses des missions sociales. La marche vers l'équilibre budgétaire est déjà douloureuse, et elle commence à peine. En santé, un dernier gros morceau occupera M. Legault : l'entente avec les médecins omnipraticiens. Le syndicat médical ne s'y oppose pas. Mais il refuse que leur salaire soit lié à des indicateurs de performance. Sa logique : on ne peut pas punir les médecins pour des problèmes qui échappent en partie à leur contrôle. En coulisses, le débat sera technique. En public, il se résumera à une question plus simple : les patients font-ils plus confiance au gouvernement ou aux médecins ? L'immigration sera un autre grand rendez-vous de l'automne. À l'Assemblée nationale, les partis se sont habitués à promettre un chiffre sur le nombre d'immigrants permanents accueillis chaque année. Ils affichent leur ouverture à l'immigration ou leur volonté de la contrôler. Cette posture omet un problème complexe : que faire avec les gens déjà sur le territoire qui attendent que leur statut soit régularisé ou officialisé ? À quoi bon instaurer un plafond artificiel de 40 000 immigrants permanents si des dizaines de milliers d'autres individus restent sur le territoire, dans l'incertitude et la précarité, ce qui les empêche de contribuer à la société ? M. Legault a déjà adouci son message. Il a d'ailleurs demandé au fédéral d'accorder un droit acquis aux travailleurs temporaires (sauf à Montréal et à Laval) qui sont menacés par la révision du programme canadien. Le gouvernement caquiste essaiera en contrepartie de convaincre les libéraux, les solidaires et le patronat de faire preuve de réalisme. Car il y a un revers à la médaille décrite ci-haut : les nouveaux arrivants exercent une pression importante sur les services publics. Par exemple, le personnel manque dans les écoles, tout comme les logements. Certes, l'immigration n'est pas la seule cause de cette rareté, qui s'observe depuis longtemps. Mais elle aggrave tout de même ce problème. Sur le front identitaire, trois rendez-vous sont déjà inscrits au calendrier : le rapport d'experts sur la laïcité à l'école, le dépôt d'un projet de constitution et les plaidoiries à la Cour suprême sur la loi 21 sur la laïcité. Ce rendez-vous pourrait être explosif. Mais malheureusement pour M. Legault, le contexte a changé. En 2016, la CAQ était coincée entre les péquistes et les libéraux. L'indépendance et les signes religieux pourraient repolariser la population. Le danger pour la CAQ : être écartelée. Ou même perdue au centre dans le vide. La rentrée s'annonce coriace. Les péquistes sont gonflés à bloc par leur victoire impressionnante dans Arthabaska, et les libéraux seront menés en Chambre par une nouvelle cheffe parlementaire, la redoutable Marwah Rizqy. M. Legault joue son avenir. Et il joue aussi la place qui lui sera consacrée dans l'histoire.

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